Le cancer du pancréas de Nathalie aurait pu être détecté et traité plus tôt. Les experts parlent de “violation du devoir de diligence”. Six ans après, la justice civile n’a toujours pas tranché. 5 ans après le ministère public veut classer à nouveau le dossier sans suite. Ce témoignage, étayé par les faits et les documents officiels, dénonce un système où la lenteur et l’inaction coûtent des vies — et du silence naît l’injustice.
Introduction
Je m’appelle Reynald, et j’ai perdu ma femme, Nathalie, elle avait 54 ans et encore plein de projets.
Elle était douce, aimante, une fille, une maman, une grand-maman comblée et mon pilier.
Elle est morte d’un cancer du pancréas, mais pas seulement de cela.
Elle est morte d’un enchaînement d’erreurs, de délais injustifiables, d’une absence de diligence médicale et, depuis, d’une justice qui traîne.
Aujourd’hui, je ne demande pas la vengeance.
Je demande la vérité.
Parce que ne pas juger, ici, c’est la tuer une deuxième fois.

💔 C’est écrit, documenté et confirmé par des experts : « violation du devoir de diligence »
Les faits sont documentés, datés, confirmés par des expertises et la littérature médicale.
Le 22 janvier 2018, une IRM évoque noir sur blanc un adénocarcinome pancréatique. Le protocole impose une ponction immédiate.
Le 5 février, une endosonographie est réalisée. Pas de ponction.
Le contrôle suivant est planifié… des semaines plus tard.
Le 19 mars, la seconde endosonographie ponctionne une lésion, mais pas celle de la tête du pancréas, celle qui inquiétait depuis le début. Résultat négatif.
Le 17 avril, une nouvelle IRM est faite. Son rapport arrivera après plusuieurs semaines de silence.
Le 25 mai, enfin, la bonne lésion est ponctionnée : cellules suspectes de malignité.
Le 31 mai, le diagnostic tombe. L’intervention aura lieu le fin juin.
Trop tard pour une résection en marges saines.
La récidive surviendra en 2019.
Ces quatre mois ont fait toute la différence entre une chirurgie potentiellement curative (R0) et une chirurgie incomplète (R1), stade 3 au moment de l'opération.
Les experts indépendants de la FMH le confirment : “une prise en charge plus rapide aurait probablement permis une chirurgie plus favorable et retardé la récidive.”
Dans un cancer du pancréas, chaque semaine compte.
Les études citées dans l’expertise sont claires : au-delà de 32 jours entre le diagnostic et le traitement, les chances de résécabilité chutent drastiquement.
Ici, il s’est écoulé plus de 120 jours.
L’art médical impose la diligence.
Elle n’a pas été respectée.
Le dossier de Nathalie a été ouvert en 2019 sur le plan civil, elle est en rémission, mais plus pour longtemps. Nous avons entamé cette procédure, car le Professeur qui a opéré Nathalie à dit en français dans le texte en parlant du médecin qui l'a prise en charge : "... il a merdé, si vous connaissez un avocat je vous conseille de le prendre..."
Six ans plus tard, le cas n’a toujours pas été jugé sur le fond et le tribunal a refusé l'audition de nos témoins.
Sur le plan pénal cela dure depuis fin 2020 avec une seule audtion. Entre-temps, il y a eu un classement, un recours, puis un maintenant nouveau projet de classement.
Le Tribunal de recours a rappelé le principe fondamental :
“In dubio pro duriore” — en cas de doute, on instruit, on ne classe pas.
Ce principe, élémentaire en droit pénal suisse, impose d’aller au procès lorsque la probabilité de faute est au moins équivalente à celle de l’acquittement.
Or, les faits établis — retards, absence de ponction, délais injustifiés — ne sont pas discutables.
Pourtant, les témoins de la famille n’ont jamais été entendus.
Les experts FMH, eux, ont confirmé la violation du devoir de diligence.
Comment expliquer qu’après six ans de procédure, aucune audience publique n’ait eu lieu aussi bien sur le plan civil que pénal ?
Comment comprendre qu’une “expertise complémentaire”, rédigée dans un ton spéculatif (“il semblerait”, “peut-être”, "il se pourrait" etc.), ait plus de poids qu’un rapport de deux professeurs émérites de centres hospitaliers universitaires ?
Pourquoi la justice choisit-elle la lenteur plutôt que la lumière ?
L’inaction devient ici une faute en soi. Chaque report, chaque silence administratif est une trahison du droit à un jugement équitable et une violation du devoir de célérité imposé par la loi.
Et pendant que la procédure s’enlise, les familles s’épuisent, les preuves se refroidissent, la douleur reste vive et les frais de justice et d'avocat prennent l'ascenseur.
Au-delà des chiffres, il y a une femme.
Nathalie n’était pas un numéro de dossier.
Elle était une mère, une fille unique, une grand-maman, une épouse.
Nous avions signé pour une maison à Tenerife, symbole d’un renouveau, une nouvelle vie. Elle rêvait de soleil et de santé. Nous avons perdu les 23 000 € d’arrhes, mais avant tout, nous avons perdu l’avenir.
J’ai encore en tête ce jour, lorsqu’elle m’a souri, perfusion au bras. Je lui ai dit : “T’es bien câblée, il ne te manque plus qu’une télé maintenant.”
Elle a ri. C’était un rire fragile, celui d’une femme qui espère encore.
Quelques mois plus tard, la condamnation à mort. Le 15 octobre 2020, Nathalie est partie, dans mes bras, mes yeux remplis de larmes.
Mais son dossier, lui, vit encore, suspendu entre indifférence et inertie.
Le droit, la médecine et l’éthique se rejoignent pourtant sur un point :
agir vite sauve des vies.
Ne pas le faire, c’est choisir la lenteur plutôt que la responsabilité.

Ce jour là, j'ai réussi à la faire sourire : T'es bien câblée, il ne te manque plus qu'une télé maintenant."
"Le Procureur Général nous l'a fait savoir, il veut classer sans suite.
Ce texte n’a pas vocation à accuser, mais à rappeler les faits et demander justice.
La médecine, la justice et la société ont un devoir commun : la diligence, la vérité et la transparence.
Ce que nous demandons aujourd’hui :
Une nouvelle expertise judiciaire indépendante et contradictoire, fondée sur les règles de l’art et la causalité médicale.
La poursuite de la procédure (pénale) au fond, sans classement prématuré.
L’audition complète des témoins de la famille.
Un audit externe sur les pratiques hospitalières dans la prise en charge des tumeurs pancréatiques (délais, communication interservices, procédures MHS).
Une réforme des délais de procédure, pour éviter que des familles attendent des années sans jugement.
L’objectif n’est pas de punir, mais de prévenir.
Car ne rien faire, ici, c’est valider un modèle où l’erreur médicale devient un non-événement et où la lenteur judiciaire enterre les responsabilités sous la poussière du temps.

Moment capturé par ma fille
Nathalie est morte une première fois d’une maladie.
Elle ne doit pas mourir une deuxième fois du silence.
Ne pas instruire, ne pas juger, ne pas agir, c’est renoncer à la justice et au devoir d’humanité.
Ce dossier n’est pas une vengeance personnelle : il est le miroir d’un système qui, parfois, oublie que derrière les procédures, il y a des vies.
J’écris pour Nathalie, mais aussi pour toutes celles et ceux qui ont perdu un proche à cause d’un retard, d’une négligence ou d’une instruction bâclée.
Ce texte est un appel à la conscience collective : médecins, magistrats, élus, journalistes, citoyens.
Parce que tant qu’on classera sans juger, la confiance dans nos institutions s’érodera — et la justice, elle aussi, tombera malade.

Dernier moment de tendresse entre ma fille et sa maman
IRM pancréatique du 22 janvier 2018 : adénocarcinome évoqué.
Endosonographies des 5 février, 19 mars et 25 mai 2018.
Rapport d’IRM du 9 juin 2018 (retard de sept semaines).
Compte rendu opératoire du 27 juin 2018 (résection R1).
Expertise FMH (deux professeurs émérites, centres hospitaliers universitaires suisses).
Arrêt du Tribunal de recours : rappel du principe in dubio pro duriore.
Témoignages médicaux concordants attestant d’un manque de diligence.
Échanges écrits entre médecins traitants et chirurgien référent.
Chronologie de procédure judiciaire (2019–2025).
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